France, Fin du XVIIIe siècle
Bronze ciselé, doré et patiné
Le fût central, en bronze patiné, de forme légèrement oblongue, est orné en son centre de motifs en bronze ciselé et doré : cannelures torsadées, rangées de petites perles et pomme de pin à l’amortissement.
Ce fût, s’inscrit dans une monture tripode, en bronze ciselé et doré, présentant, dans la partie supérieure, des têtes de femmes, avec collerettes, et se terminant par des pieds de biche.
Ils reposent sur un contre socle, rond, ouvert en son centre ou repose une feuille en bronze doré.
Le socle inférieur est également rond et en bronze doré.
La référence à l’Antique
L’ouverture du Grand Tour, tant numériquement que géographiquement à partir du milieu du XVIIIème siècle, permit à un nombre important d’architectes, de peintres et de sculpteurs de se mettre en contact direct avec les vestiges de l’Antiquité. Joignant à leur sensibilité artistique une méthode scientifique, ils se rendirent sur les lieux et étudièrent les monuments, effectuant des fouilles et dressant des relevés minutieux. Ils diffusèrent ensuite le fruit de leurs travaux à travers des publications érudites. Parmi les sources archéologiques disponibles, les modèles architecturaux grecs antiques, provenant tant de la métropole (Grèce continentale), que de ses colonies en Asie Mineure et dans l’Italie méridionale (Paestum) et la Sicile, ainsi que la céramique grecque antique (communément appelée étrusque) tiennent une place dominante.
L’association directe entre source d’inspiration et création originale est évoquée tant par la nomenclature des décors de la période (« à la grecque », « grec », « genre étrusque ») que par l’appropriation progressive de leurs formes.
Ainsi, ce modèle de flambeau illustre cette vogue décorative rencontrée à la toute fin du XVIIIème siècle et annonce déjà le style Empire.
Aboutissement du style Louis XVI, l’utilisation de la forme tripode et des pieds en pattes d’animaux est caractéristique de cette période et fait directement référence aux objets d’art antiques découverts lors des fouilles réalisées à Herculanum (maison des Cervi) et Pompéi. Ces derniers, inspirés des pieds de biches, ont en effet été déclinés dans tous les arts décoratifs.
Jean-Demosthène Dugourc (1749-1825)
L’élaboration d’un style nouveau, dans lequel l’antiquité est traitée de manière plus archéologique qu’auparavant, doit beaucoup au rôle des ornemanistes comme Jean-Demosthène Dugourc dont les dessins ont pu fournir des sources d’inspiration au bronzier auteur de ce flambeau.
Au service du Duc d’Orléans, le père de ce dernier possédait une fortune honorable et permit à son fils de partager les études du Duc de Chartres.
À 15 ans, en 1764, Jean-Demosthène fit un court séjour à Rome, attaché à l’Ambassade du Comte de Cani où il découvrit l’Antiquité.
Grâce à son union avec la sœur de François-Joseph Bélanger, architecte du Comte d’Artois (futur Charles X), Dugourc devint dessinateur de Monsieur. Dès 1784, il fut nommé dessinateur du Garde-Meuble de la Couronne et intendant des bâtiments de Monsieur. Rapidement connu dans l’Europe entière, il reçut alors des commandes de dessins pour le Roi de Suède, le Grand-Duc de Russie Paul Ier ou l’impératrice Catherine II.
Contribuant très tôt au retour du goût néoclassique par ses dessins d’arabesques et ses intérieurs dans le style étrusque, il publia 6 planches d’arabesques gravées qu’il fut le premier à introduire dans l’architecture mais aussi dans les meubles, les tentures et les étoffes.
La révolution met un terme à ces commandes prestigieuses et Dugourc travailla alors pour une manufacture de papiers-peints, où il inventa des modèles pour des cartes à jouer ou des en-têtes de papier à lettres.
En 1799, il s’installa en Espagne, travaillant pour une des résidences de la famille royale, la Casa del Labrador à Aranjuez et pour les duchesses d’Albe et d’Osuna.
Dugourc revint en France en 1814 : la montée sur le trône de son ancien mentor lui fit retrouver son titre de dessinateur du Garde-Meuble jusqu’à sa mort, en 1825.
Bibliographie
Hans Ottomeyer, Vergoldete Bronzen , Tome I, p. 217-315
Jean-Pierre Samoyault, Mobilier français Consulat et Empire, Paris, 2009
Les dossiers du Musée des Tissus /3, de Dugourc à Pernon, nouvelles acquisitions graphiques pour les musées, Paris 1990
Bon état général, usures d’usage sur la dorure.